DECISION N°2014-44/ARMP/PR-CR/CRD/CD/SP/DRAJ/SA du 03 décembre 2014 déclarant fondé le recours de la Société « AKORAZ-BTP» et irrégulière l’imposition à la Société « AKORAZ-BTP» de la prise d’un engagement notarié avant la signature du Marché à l’issue de la procédure d’Appel d’offres N°023/MESRS/CAB/SGM/PRMP/CCMP/PCENCU/S-PRMP/SA du 23 avril 2014 pour la construction de trois (3) blocs pédagogiques au profit des Centres Universitaires d’ABOMEY, de DJOUGOU et de TCHAOUROUlancée par le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (MESRS)
LE CONSEIL DE REGULATION STATUANT EN MATIERE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS,
Vula loi n°2009-02 du 07 ao├╗t 2009 portant Code des marchés publics et des délégations de service public en République du Bénin;
Vule décret n°2012-224 du 13 ao├╗t 2012 portant attributions, organisation et fonctionnement de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP) ;
Vule décret n°2012-225 du 13 ao├╗t 2012 portant nomination du Secrétaire Permanent de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics;
Vuledécret n°2010-496 du 26 novembre 2010 portant organisation, attributions et fonctionnement de la Personne Responsable des Marchés Publics (PRMP), de Commissions de passation et des Cellules de Contrôle des Marchés Publics;
Vule décret n°2012-364 du 26 octobre 2012 portant nomination des membres et du Président du Conseil de Régulation de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics;
Vule décret n°2014-033 du 29 janvier 2014 portant nomination de Monsieur Eugène DOSSOUMOU en qualité du Président de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics;
Vule décret n°2012-225 du 13 ao├╗t 2012 portant nomination du Secrétaire Permanent de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics;
Vula décision n°2014-08/ARMP-PR/SP/SA du 28 novembre 2014 portant désignation de l’intérimaire du Secrétaire Permanent de l’ARMP;
Vula lettre n°22/AK/DG/DA/SA-14 du 08 octobre 2014, enregistrée au Secrétariat Administratif de l’ARMP sous le numéro 886 du 10 octobre 2014, par laquelle l’ARMP a été saisie d’un recours de la société « AKORAZ» contestant les conditions de la signature du marché pour la construction de trois blocs pédagogiques au profit des centres universitaires d’Abomey, de Djougou et de Tchaourou (lot 2) à la suite de l’appel d’offres n° 023/MESRS/CAB/SGM/PRMP/CCMP/PCENCU/S-PRMP/SA du 23 avril 2014lancé par le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (MESRS) ;
Vula lettre n°1468/PR-ARMP/CRD/SP/DRAJ/SRR/SA du 15 octobre 2014 du Président de l’ARMP réclamant les pièces relatives à l’appel d’offres concernées à la Personne Responsable des Marchés (PRMP) du MESRS ;
Vula lettre n°2014-7097/MESRS/CAB/SGM/PRMP/S-PRMP/SA du 17 octobre 2014, enregistrée au Secrétariat Administratif de l’ARMP à la m├¬me date sous le numéro 899, par laquelle la PRMP du MESRS a transmis les informations demandées à l’ARMP;
Vul’ensemble des pièces du dossier;
Ou├» le rapport de Monsieur Sèmako Alfred HODONOU, Secrétaire Permanent de l’ARMP par intérim, assisté de madame O. Sylvie Rosine DONTE, Directrice de la Réglementation et des Affaires Juridiques de l’ARMP;
Sur proposition des membres de la Commission de Règlement des Différends;
Les membres du Conseil de Régulationprésents ou représentés :Messieurs Eugène DOSSOUMOU, Président, Issiaka MOUSTAFA, 1erVice-Président, Théodule NOUATCHI, 2èmeVice-Président, Madame Aurélie Antoinette M. BADA DEGUENONet Messieurs Rémy ENIANLOKO, Pierre d’Alcantara ZOCLI, Expédit M. CAKPO-ASSOGBA, Gualbert Félix Jonas S. A. KOUDOGBO, Saliou YOUSSAO ABOUDOU et Victor FATINDE, membres ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi:
I-LES FAITS
Par lettre n°22/AK/DG/DA/SA-14 du 08 octobre 2014, enregistrée au Secrétariat Administratif de l’ARMP sous le numéro 886 du 10 octobre 2014, la société « AKORAZ-BTP» représentée par son Directeur Général, a saisi l’ARMP d’un recours. Elle conteste les conditions préalables liées à la signature du marché pour la construction de trois (3) blocs pédagogiques au profit des centres universitaires d’Abomey, de Djougou et de Tchaourou (lot 2), à la suite de l’appel d’offres n°023/MESRS/CAB/SGM/PRMP/CCMP//PCENCU/S-PRMP/SA du 23 avril 2014lancé par le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (MESRS).
En effet, déclaré attributaire provisoire du lot 2 de ce marché, « AKORAZ BTP» expliquequ’elle a d├╗ faire plusieurs démarches à l’endroit de la PRMP du MESRS avant d’obtenir le 17 septembre 2014, la lettre de notification d’attribution dudit marché datant du 25 ao├╗t 2014, ce qui n’a pas été le cas des autres attributaires. Dans ladite lettre de notification, il est mentionné « qu’en raison des contraintes budgétaires, l’exécution des travaux y afférents ne pourra pas commencer au cours de l’exercice 2014». En réponse à son courrier en date du 24 septembre 2014 demandant quelques explications, la PRMP du MESRS lui a signifié « qu’il n’y a aucun blocage pour la mise à disposition de son contrat». Toutefois, il lui demande de « satisfaire à la recommandation du PV N°11-17/DRF/DNCMP/2014 de la DNCMP en date du 12 ao├╗t 2014 qui l’oblige à prendre un engagement notarié que les travaux seront exécutés dans les règles de l’art et dans les délais contractuels». Il ajoute que plusieurs tractations ont été faites depuis l’ouverture des plis,en l’occurrence par le DPPpour « le sortir du jeu», le convaincre de laisser le dossier « en récompense d’autres marchés» et lui demander d’écrire pour y renoncer; mais qu’il s’y est opposé. Ayant refusé cette formule, c’est-à-dire la renonciation au marché dont elle est attributaire contre la promesse d’autres marchés plus tard, ils ont donc écrit à la DNCMP pour que celle-ci lui exige de prendre un engagement notarié avant la signature du contrat. La requérante souligne qu’aucune disposition de la réglementation des marchés publics en vigueur au Bénin, n’exige la prise d’un tel acte qui constitue un surco├╗t non prévu dans son offre.
Après avoir exercé un recours préalable contre cette condition de signature du marché sans succès auprès de la PRMP du MESRS, la société « AKORAZ BTP» sollicite l’arbitrage de l’ARMP.
II-SUR LA RECEVABILITE
Considérant les dispositions de l’article145 aliénas 1eret 4 de la loi n°2009-02 du 07 ao├╗t 2009 susvisée selon lesquelles: tout candidat ou soumissionnaire peut, dans le cadre des procédures de passation des marchés publics et des délégations de service public, introduire un recours devant l’autorité contractante ou son supérieur hiérarchique contre toute décision lui faisant grief dans un délai de cinq (05) jours ouvrables à compter de la date de la publication de la décision d’attribution du marché ou la délégation de service public, ou dans les dix (10) jours ouvrables avant la date prévue pour le dépôt de sa candidature ou de sa soumission;
Que suivant l’article 146 de la m├¬me loi, le requérant non satisfait de la décision rendue suite à son recours gracieux ou hiérarchique, dispose d’un délai de deux (2) jours ouvrables pour compter de la décision ainsi rendue par l’autorité contractante ou son supérieur hiérarchique pour exercer un recours devant l’ARMP et qu’il peut exercer le m├¬me recours en l’absence de décision rendue par l’autorité contractante ou son supérieur hiérarchique, après l’expiration d’un délai de trois (3) jours ouvrables à compter de sa saisine;
Qu’il résulte des dispositions des deux articles ci-dessus cités que:
–l’exercice du recours préalable devant l’autorité contractante ou son supérieur hiérarchique est enfermé dans un délai qui court pour compter de la date de notification du rejet de l’offre du soumissionnaire et constitue une condition de recevabilité devant l’ARMP;
–l’exercice du recours devant l’ARMP est enfermé dans un délai qui court pour compter de la date d’expiration du délai de trois (3) jours ouvrables imparti à l’autorité contractante ou son supérieur hiérarchique.
Considérant que dans le cas d’espèce,la société « AKORAZ-BTP»a re├ºu la notification d’attribution du marché le 17 septembre 2014 par lettre n°5823-2014/MESRS/SGM/PRMP/CPMP/PCENCU/S-PRMP/SA du 25 ao├╗t 2014et qu’elle a saisi la PRMP du MESRS d’un premier recours préalable le 24 septembre 2014, soit dans les cinq (5) jours ouvrables suivant, conformément au délai légal prescrit;
Que par lettre n°2014-6667/MESRS/SGM/PRMP/CPMP/PCENCU/S-PRMP/SA du 30 septembre 2014, la PRMP du MESRS lui a répondu en apportant de nouveaux éléments contre lesquels elle a encore exercé un recours le 03 octobre 2014 par lettre n°21/AK/DG/DA/SA-14 du 1eroctobre 2014;
Que la PRMP du MESRS devrait lui répondre au plus tard le 08 octobre 2014;
Que n’ayant re├ºu aucune réponse,la société « AKORAZ-BTP» a saisi l’ARMP dans les deux (02) jours suivants, c’est-à-dire le 10 octobre 2014;
Qu’il s’ensuit que le recours exercé parla société « AKORAZ-BTP» remplit les conditions de forme requises pour ├¬tre déclarérecevable.
III-DISCUSSION
A-MOYENS DE LA REQUERANTE
A l’appui de son recours, la société « AKORAZ-BTP» conteste l’exigence qui lui est faite dans le procès-verbal de la DNCMP, sur la demande de l’autorité contractante, de prendre un engagement notarié avant la signature du contrat. Elle soutient que:
–« la lettre de soumission contenue dans son offre est un acte d’engagement pour l’exécution du marché, du prix du marché et suivant les délais contractuels;
–le Cahier des Clauses Administratives Générales (CCAG) et le Cahier des Clauses Administratives Particulières donnent les conditions d’exécution d’un contrat et prévoient en cas de non-respect du délai contractuel les pénalités de retard» ;
–le CCAG et le CCAP font partie intégrante du contrat;
–aucune disposition de la réglementation des marchés publics en vigueur en République du Bénin n’exige la prise d’un engagement notarié avant l’exécution d’un marchépublic ;
Par ailleurs, il dénonce le fait que les travaux relatifs aux autres lots du marché ont été lancés sur les sites de Djougou et d’Abomey alors que les contrats de ces deux attributaires sont en cours de signature.
B-LES MOYENS DE LA PRMP DU MESRS
La PRMP du MESRS fait remarquer que la saisine de l’ARMP par la société « AKORAZ BTP» est surprenante car, après les échanges de correspondances avec son Directeur Général, elle l’a convié à une séance d’entretien en présence du Chef du Secrétariat de la PRMP, sans le coordonnateur du PCENCU, car ce dernier était absent du territoire national, à l’effet d’aplanir les différends et de trouver un heureux dénouement au dossier. A l’issue de cet entretien, le Directeur Général de la société « AKORAZ-BTP» a marqué sa disponibilité pour aider la PRMP pour la signature du contrat sans l’exigence de la recommandation du PV n° 11-17/DRF/DNCMP/2014 de la DNCMP en date du 12 ao├╗t 2014 qui l’oblige à prendre un engagement notarié que les travaux seront exécutés dans les règles de l’art et dans les délais contractuels.
Elle soutient par ailleurs que:
1-le report de l’exécution dudit marché dans la lettre de notification pour un autre exercice budgétaire, tient au fait que le coordonnateur du projet PCENCU a informé la PRMP du MESRS qu’une partie des fonds a été utilisée pour construire des ateliers devant abriter les matériels et équipements de transformation financés par la KfW et réceptionnés dans la m├¬me période. A cet effet, la PRMP a recommandé de s’entendre avec l’un des entrepreneurs; ce qui aurait été fait avec la Société « AKORAZ-BTP» et compte rendu verbal a été fait à la PRMP;
2-le critère de choix de ce lot relèverait de l’entente directe entre le coordonnateur PCENCU et le Directeur général de la société « AKORAZ-BTP» qui aurait accepté;
3-l’exigence à ce seul attributaire de marché de la prise d’un engagement notarié avant la signature du marché réside dans le fait que la commission d’analyse a constaté que dans les devis quantitatifs et estimatifs (DQE) et le bordereau des prix unitaires (BPU) de son offre, les prix proposés par la société « AKORAZ-BTP» sont trop justes et inférieurs au co├╗t prévisionnel jusqu’à concurrence de moins de 23% et font craindre une non-exécution du marché. La prise d’acte notarié rassurerait l’autorité contractante; d’ailleurs la DNCMP aurait fait sienne cette inquiétude en entérinant la prise d’un tel acte;
4-le démarrage des travaux n’a aucunement eu lieu car le contrat de marché n’est pas encore signé par l’autorité approbatrice; d’ailleurs aucun ordre de service n’a été émis par la PRMP à cet effet;
5-en ce qui concerne les manœuvres dénoncées par la Société AKORAZ-BTP, la PRMP n’en a nullement été saisie.
Aussi, la PRMP du MESRS affirme-t-elle que le réaménagement suivant a été opéré dans le plan de passation des marchés publics par le coordonnateur du PCENCU: la construction au niveau de Savè est transférée à Djougou, la construction au niveau de Djougou est transférée à Tchaourou et celle d’Abomey reste sans changement. En outre, les co├╗ts prévisionnels affectés aux constructions dans le PPMP, sont des réservations faites à hauteur de 45% pour le budget 2014.
C-CONSTATS ISSUS DE L’INSTRUCTION
De l’instruction de ce dossier, il ressort les constats ci-après:
–la notification d’attribution du marché au requérant a été tardive: le procès-verbal de la DNCMP date du 18 ao├╗t 2014 alors qu’il n’a re├ºu la notification d’attribution du marché que le 17 septembre 2014, soit un mois plus tard;
–les informations contenues dans la lettre de notification du marché et la réponse donnée par la PRMP au recours préalable de la société « AKORAZ BTP» ont varié: il s’agissait au départ « des contraintes budgétaires» et ensuite il lui est dit « qu’il n’y a aucun blocage pour la mise à disposition de son contrat», mais qu’il doit prendre « un engagement notarié que les travaux seront exécutés dans les règles de l’art et dans les délais contractuels»;
–la clause 44 du CCAG du DAO de l’appel d’offres a prévu des modalités de garantie (garantie de parfait achèvement des travaux et garanties particulières) pour sécuriser l’exécution du marché.
–le projet de contrat prévoit aussi des pénalités de retard;
–le rapport de dépouillement des offres en sa page 9 souligne qu’après analyse comparative de l’offre corrigée de « AKORAZ-BTP» et de l’offre de son concurrent immédiat du lot 2, il se dégage une différence de 177191024 FCFA, et conclu par l’allégation selon laquelle le montant de soumission de la Société AKORAZ-BTP est largement en dessous des co├╗ts prévisionnels issus des études faites par le service technique de la structure initiatrice du dossier d’appel d’offres. Cette remarque a été faite uniquement à la Société « AKORAZ-BTP», alors que dans les m├¬mes conditions, en faisant une étude comparative entre le montant de soumission de l’attributaire du lot 1 et son concurrent immédiat, il se dégage aussi une différence de 107730251 F CFA. La commission de passation des marchés publics n’a pas mentionné un tel écart aussi important que celui de la Société « AKORAZ-BTP». En conséquence, il y a une discrimination manifeste à l’égard de la Société « AKORAZ-BTP»;
–les montants inscrits dans le Plan de Passation des Marchés Publics du MESRS suivant le journal des marchés public n° 602 du 06 mars 2014 sont tous respectivement de deux cent trente-neuf millions (239000000) francs CFA pour les travaux d’Abomey et de Djougou, alors que les montants desdits marchés sont respectivement cinq cent soixante-dix-huit millions huit cent quatre-vingt-quatre mille huit cent quatre-vingt-dix-sept ( 578884897) francs CFA et deux cent quarante-six millions neuf cent soixante-onze mille cinq cent un (246 971501) francs CFA;
–le mémoire de la PRMP indique que le report de l’exécution du marché du lot 2 dans la lettre de notification pour un autre exercice budgétaire, tient au fait que le coordonnateur du projet PCENCU évoque qu’une partie des fonds a été utilisée pour construire des ateliers devant abriter les matériels et équipement de transformation financés par la KfW. A la vérification du Plan de Passation des Marchés Publics du MESRS, ce marché n’a pas été planifié.
IV-OBJET DU RECOURS:
Le présent recours de la Société « AKORAZ-BTP» porte sur :
–la régularité de l’exigence d’un engagement notarié avant la signature du marché;
–la violation du principe d’égalité de traitement des candidats;
–les modifications apportées au budget du marché en cours de passation.
A-SUR LA REGULARITE DE L’EXIGENCE D’UN ENGAGEMENT NOTARIE A LA SOCIETE « AKORAZ-BTP» AVANT LA SIGNATURE DU MARCHE
Considérant les dispositions de l’article 79 alinéa 1erdela loi n°2009-02 du 07 ao├╗t 2009 portant code des marchés publics et des délégations de service public en République du Béninselon lesquelles: « ÔǪ l’évaluation des offres se fait sur la base de critères économiques, financiers et techniques mentionnés dans le dossier d’appel d’offres afin de déterminer l’offre conforme évaluée la moins-disante»;
Considérant qu’aux termes de l’article 84 alinéa 3 de la m├¬me loi, il est prescrit:« L’autorité contractante attribue le marchéÔǪ au soumissionnaire dont l’offre satisfait aux conditions énoncées dans la présente loi»;
Qu’aux termes de ladite loi, aucune disposition n’a prévu d’exiger un engagement notarié à un attributaire avant la signature d’un marché ;
Que ladite réglementation, notamment laloi n°2009-02 du 07 ao├╗t 2009a prévu:
├╝en ce qui concerne les garanties:
- l’article 113 alinéas 1eret 2: « Sans préjudice des dispositions des lois et règlements en vigueur en matière de garantie des travaux, des fournitures et des services, les titulaires d’un marché sont tenus de fournir une garantie de bonne exécution lorsque la nature et le délai d’exécution du marché le requièrent.
Elle est fixée dans le cahier des charges et doit ├¬tre en rapport avec l’objet du marché»;
- l’article 115: « La garantie de bonne exécution ou cautionnement définitif doit ├¬tre constituée dans les trente (30) jours qui suivent la notification du marché et, en tout cas, avant le premier paiement.
En cas d’existence d’une garantie de l’offre, le cautionnement définitif doit ├¬tre constitué avant que la caution de garantie de l’offre n’expire»;
├╝en ce qui concerne le prix du marché, l’article 121 alinéa 1erdispose: « Le prix du marché rémunère le titulaire. Il est réputé lui assurer un bénéfice lui assurer et couvrir toutes les dépenses qui sont la conséquence nécessaire et directe des travaux, des fournitures ou des servicesÔǪ»;
Qu’au surplus, le dossier d’appel d’offres sur la base duquel la société « AKORAZ BTP» a été sélectionnée n’a pas prévu d’exiger la prise d’un acte notarié avant la signature du marché;
Qu’en exigeant un tel engagement avant la signature du marché à la requérante, la PRMP du MESRS a changé en cours de procédure, les règles préétablies dans le dossier d’appel d’offres, ce qui s’analyse comme de l’arbitraire et contraire au principe de transparence des procédures;
Considérant que nonobstant les dispositions législatives ci-dessus citées, la PRMP du MESRS justifie l’exigence de l’acte notarié par le fait que « dans les devis quantitatifs et estimatifs (DQE) et le bordereau des prix unitaires (BPU) de son offre, les prix proposés par la société « AKORAZ-BTP» sont trop justes et inférieurs au co├╗t prévisionnel jusqu’à concurrence de moins de 23% et font craindre une non-exécution du marché», ce qui s’analyse comme une offre anormalement basse ;
Que paradoxalementla Direction Nationale de Contrôle des Marchés Publics (DNCMP)a validé le rapport d’analyse des offres sans se référer aux prescriptions de la réglementation en matière d’offre anormalement basse, ni des dispositions ci-dessus rappelées;
Que l’organe de contrôle (la DNCMP) ne devrait pas cautionner une telle mention qui non seulement est arbitraire mais aussi discriminatoire car orientée spécialement vers un seul soumissionnaire sans fondement valable, c’est-à-dire sans aucune preuve que le montant du marché proposé par la Société « AKORAZ-BTP» est anormalement bas;
Que m├¬me en cas d’offre anormalement basse, la PRMP du MESRS aurait pu recourir aux dispositions de l’article 87 de la loi n°2009-02 du 07 ao├╗t 2009pour demander à la société « AKORAZ BTP» de lui apporter des justifications liées au prix de son offre;
Qu’une offre anormalement basse se détermine suivant des modalités bien précises et prédéterminées et non par rapport au montant prévisionnel du marché ni au prix de l’offre d’un autre soumissionnaire, car le co├╗t prévisionnel du marché pourrait ├¬tre sous-estimé ou que le prix de l’offre avec laquelle la comparaison est faite pourrait ├¬tre trop élevé aussi;
Considérant qu’en outre, la variation des informations contenues dans la lettre de notification d’attribution et la réponse de la PRMP du MESRS au recours préalable de la société « AKORAZ BTP» laisse présumer des manœuvres dilatoires ainsi que des présomptions de tractations comme le dénonce la requérante, susceptible de porter atteinte à la transparence de la procédure de passation de ce marché;
Qu’au regard de ce qui précède, l’exigence de la prise d’un acte notarié avant la signature dudit marché est irrégulière et c’est à bon droit que la société « AKORAZ BTP» le conteste.
B-SUR LA VIOLATION DU PRINCIPE D’EGALITE DE TRAITEMENT DES CANDIDATS:
Considérant qu’aux termes de l’article 4 de la loi n°2009-02 du 07 ao├╗t 2009: « Les principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures s’imposent aux autorités contractantes dans le cadre des procédures de passation des marchés publics et de délégations de service public et ce, quel qu’en soit le montant »;
Considérant qu’aux termes de l’article 85 alinéa 1erde la loi n°2009-02 du 07 ao├╗t 2009: « L’attribution est notifiée au soumissionnaire retenu. Les autres soumissionnaires sont informés du rejet de leur offre et leur garantie leur est restituée»;
Qu’ainsi, pour la célérité et la transparence des procédures, l’égalité de traitement des candidats, la PRMP du MESRS devrait notifier les résultats à tous les candidats sans exception au m├¬me moment;
Considérant qu’en l’espèce, le soumissionnaire dit avoir fait « plusieurs démarches» avant de se voir notifier les résultats des travaux d’analyse des offreset la PRMP reconnait implicitement avoir procédé à la signature des contrats avec les attributaires des lots 1 et 3 qui seraient en cours d’approbation;
Que pour preuve, la requérant a joint la lettre de notification datant du 25 ao├╗t 2014 qu’elle n’a re├ºue que le 17 septembre 2014;
Qu’en principe, quinze (15) jours après la notification des résultats, s’il n’y a aucun recours, la PRMP du MESRS devrait procéder à la signature du contrat avec la requérante au lieu de le faire seulement avec les autres attributaires;
Qu’ayant privilégié la notification des résultats à certains candidats en la retardant pour la requérante d’une part, et la signature du contrat avec certains candidats d’autre part, la PRMP du MESRS a fait un traitement inégalitaire des soumissionnaires et ainsi violé les dispositions de l’article 4 de la loi n°2009-02 du 07 ao├╗t 2009.
C-SUR LES MODIFICATIONS DU BUDGET DE CE MARCHE EN COURS DE SA PASSATION
Considérant qu’aux termes de l’article 23 de la loi n°2009-02 du 07 ao├╗t 2009 susvisée: « L’autorité contractante est tenue de s’assurer de la mise en place et de la disponibilité du financement avant le lancement de la consultation conformément à son plan prévisionnel annuel de passation des marchés et ce, jusqu’à la notification du marché.
Le lancement d’une procédure de passation d’un marché public doit se conformer aux réglementations en matière de finances publiques»;
Qu’en conséquence, une partie des ressources financières réservée pour l’exécution du marché du lot 2, ne saurait ├¬tre utilisée à d’autres fins, sans préalablement la révision et la publication du Plan de Passation des Marchés Publics (PPMP);
Considérant les dispositions de l’article 2, alinéa 2 point 2 du décret n°2010-496 du 26 novembre 2010 visé supra selon lesquelles la PRMP est chargée de procéder à la réservation du crédit et sa confirmation jusqu’à la notification du marché;
Qu’en cas de contraintes budgétaires survenues à la suite du lancement d’une procédure de marché public, l’autorité contractante doit pouvoir en faire mention dans son rapport d’analyse des offres et recueillir l’avis de l’organe de contrôle compétent;
Considérant que dans le cas d’espèce:
–la mention des contraintes budgétaires n’est pas faite dans le procès-verbal validé par la DNCMP;
–la PRMP du MESRS a écrit dans sa lettre n°2014-6667/MESRS/CAB/SGM/PRMP/CCMP/S-PRMP du 30 septembre 2014 « qu’il n’y a aucun blocage pour la mise à disposition du contrat» de la société « AKORAZ BTP» si ce n’est la prise d’un engagement notarié;
–la PRMP du MESRS a affirmé que« les co├╗ts prévisionnels affectés aux constructions dans le PPMP, sont des réservations faites à hauteur de 45% pour le budget 2014» et qu’on peut déduirequel’exécution desdits marchés devra s’étendre sur deux exercices budgétaires au moins ;
–« le Coordonnateur du projet PCENCU a informé la PRMP du MESRS qu’une partie des fonds a été utilisée pour construire des ateliers devant abriter les matériels et équipements de transformation financés par la KfW et réceptionnés dans la m├¬me période»;
Qu’il se pose les questions ci-aprèsen ce qui concerne ce dernier point :
–comment ces ateliers ont-ils été construits sur une telle prévision à l’insu de la PRMP pour que ce soit le Coordonnateur qui l’en informe?
–qui a conduit la procédure des marchés de construction desdits ateliers?
–pourquoi ce marché de construction d’ateliers ne figure pas dans le plan de passation des marchés publics du MESRS?
–y a-t-il des procédures de marchés publics conduites par le Coordonnateur du PCENCU et d’autres par la PRMP du MESRS?
Qu’il convient, sans répondre à toutes ces questions, de rappeler que la PRMP du MESRS est la seule habilitée à conduire les procédures de passation des marchés publics du Ministère, m├¬me si c’est dans le cadre d’un projet;
Que si les modifications du budget de ces marchés sont effectivement faites à l’insu de la PRMP du MESRS, elles sont irrégulières;
Qu’une procédure irrégulière ne saurait emp├¬cher l’aboutissement d’une procédure régulière, objet du présent litige avec la société « AKORAZ BTP»;
Qu’au regard de tout ce qui précède, la PRMP du MESRS est tenue de procéder à la signature du contrat avec la société « AKORAZ BTP».
Que toutefois, elle peut, conformément aux dispositions de l’article 93 alinéa 1erde la loi susvisée, préciser dans les stipulations contractuelles le début des délais d’exécution.
PAR CES MOTIFS ET SANS QU’IL SOIT NECESSAIRE DE STATUER SUR LES AUTRES MOYENS,
DECIDE
Article1: Le recours de la société « AKORAZ BTP» est recevable.
Article2: L’imposition de la prise d’un engagement notarié à la société « AKORAZ BTP» avant la signature du marché dont il est attributaire est irrégulière.
En conséquence, la recommandation de la DNCMP consistant à « faire prendre à l’entreprise « AKORAZ BTP» attributaire du lot 2 dudit marché, un engagement notarié que les travaux seront exécutés dans les règles de l’art et dans les délais contractuels» et contenue dans son procès-verbal n°11-17/DRF/DNCMP 2014 du 12 ao├╗t 2014 est discriminatoire et inopérante.
Article 3:La PRMP du MESRS procède à la signature du contrat avec la société « AKORAZ BTP» dès réception de la présente décision et l’introduit pour approbation auprès de l’autorité compétente.
Elle fait ampliation à l’ARMP de toutes les mesures correctives prises à cet effet dans un délai de cinq (5) jours ouvrables à compter de la réception de la présente décision.
Article 4: La présente décision sera notifiée:
–au Directeur Général de la Société « AKORAZ-BTP»;
–à la Personne Responsable des Marchés Publics et au Chef de la Cellule de Contrôle des Marchés Publics du MESRS;
–au Ministre d’Etat Chargé de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique ;
–au Ministre de l’Economie, des Finances et des Programmes de Dénationalisation;
–au Directeur National de Contrôle des Marchés Publics.
Article 5: La présente décision sera publiée dans le Journal des Marchés Publics, dans le quotidien ÔÇÿ’LA NATION” et sur le site web de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics.
Le Président du Conseil de Régulation,
Eugène DOSSOUMOU
Le Président de la Commission de Règlement des Différends,
Issiaka MOUSTAFA
Le Secrétaire Permanent de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics par intérim,
Rapporteur
Sèmako Alfred HODONOU